Cet article a été publié par Fabien Grenet sur le blog qu'il a tenu entre 2008 et 2016. Pour des question de référencement (SEO), lorsque l'agence nospoon a été créé, il a été décidé de transformer le blog de Fabien en site pour l'agence. Tous les articles ont ainsi été conservés, mais n'engagent pas l'agence quant aux contenus qui sont abordés.

Design de service et Entreprise collaborative : le couple parfait ?

Mon intérêt pour le design de service est lié à ma prise de conscience du mouvement inéluctable de l’entreprise vers le modèle dit « d’entreprise collaborative » il y a quelques années. A cette époque mon rôle consistait à accompagner des acteurs métiers dans la mise en oeuvre de leurs processus opérationnels et des outils […]

Mon intérêt pour le design de service est lié à ma prise de conscience du mouvement inéluctable de l’entreprise vers le modèle dit « d’entreprise collaborative » il y a quelques années.

A cette époque mon rôle consistait à accompagner des acteurs métiers dans la mise en oeuvre de leurs processus opérationnels et des outils permettant de les mener à bien, à leur donner la capacité à être autonome, à les professionnaliser et bien sur à leur permettre d’évaluer & de s’assurer de la valeur ajoutée pour leurs utilisateurs finaux. Dans le même temps je vivais dans mon quartier une expérience incroyable de transformation à petite échelle de la société, initiée par un réseau social de proximité qui donnait les moyens aux habitants de construire ensemble un écosystème local répondant parfaitement à leurs besoins.

Tout cela m’a petit à petit fait réaliser que la majeure partie des difficultés que nous rencontrions en entreprise étaient liées au modèle « command & control » sur lequel était bâtie l’organisation et plus encore de la culture qui en découlait. En particulier, modèle et culture ne permettaient pas d’être suffisamment « user centric » et encore moins « bottom-up », donc de répondre efficacement aux besoins réels des employés en bout de chaîne en les écoutant alors que ce sont eux qui font la valeur de l’entreprise.

Recherches et lectures sur les moyens de remettre l’humain au centre de l’entreprise et de ses préoccupations m’ont donc amené à m’intéresser entre autre à l’approche que propose le design de service. Basée sur la compréhension des comportements d’usages, le design de service est une approche visant à améliorer l’utilité, l’efficacité et l’expérience d’un service ainsi que les interactions entre utilisateurs et fournisseur par l’organisation et la scénarisation de son écosystème (infrastructures, moyens matériels, outils de communication, utilisateurs, …) (source).

design de service et entreprise collaborative : le couple parfait ? (image)

La pensée design.

Un des apports capitaux du design de service à l’entreprise collaborative est le mode de pensée design. Penser design est souvent une rupture pour l’entreprise car ce mode de pensée ne peut exister que si l’on part de la fin, si l’on prend le problème à l’envers à partir de l’utilisateur et non de la fonction.

Penser design, c’est se demander « quelle valeur l’objet, l’outil, l’organisation, le système, … que je suis en train de concevoir va-t-il apporter à l’utilisateur ? » pour identifier les éléments clés maximisant son utilité, efficacité, qualité et contribuant à rendre mémorable son expérience d’usage.

Ce mode de pensée permet de manière itérative de se rapprocher des éléments indispensables à l’apport d’une réponse adaptée à la question posée. Il évite les écueils liée à une focalisation excessive sur la fonction en privilégiant l’usage et la valeur apportée.

design de service et entreprise collaborative : le couple parfait ? (image)

Par exemple, aborder la réorganisation d’une entité avec un mode de pensée design amènerait à définir les niveaux hiérarchiques, équipes, principes de management, chaînes de décision, … pour qu’ils facilitent la vie aux opérationnels qui produisent la valeur de l’entreprise (i.e. les employés lambda) en leur donnant un cadre organisationnel, structurel, décisionnaire, … adéquat pour exercer au mieux leurs missions. A contrario, le mode de pensée classique conduirait à décider de l’organisation qui permet au top management de disposer d’un contrôle précis sur les niveaux de management intermédiaire facilitant la propagation descendante de l’information mais n’apportant que peu de valeur aux employés en bout de chaîne et ne facilitant pas l’accroissement de leur cadre productif.

Autre exemple, aborder le choix d’outils SI avec un mode de pensée design consisterait à se poser des questions de type « permettra-t-il de gagner du temps ?» « apporterat-t-il plus de précision dans la réalisation ?» « facilitera-t-il la résolution des problèmes quotidiens ? » … là ou le mode de pensée classique conduirait par exemple à s’interroger sur « la possibilité de donner des droits granulaires aux utilisateurs » ou « la possibilité de fixer une date d’échéance aux taches », questions dont les réponses ne garantissent en rien la valeur ajoutée effective perçue et mesurée par l’utilisateur.

Ainsi, que le sujet du questionnement soit un service au sens propre du terme ou pas, il est toujours possible de l’aborder sous le mode de pensée design et d’appliquer une démarche proche du design de service pour concevoir la réponse. J’invite d’ailleurs les plus curieux d’entre vous désireux de changer leurs angles d’approche, à lire Le but d’Eliyahu M. Goldratt. Si le livre ne traite pas du design de service, l’approche qui y est décrite est dans une mouvance d’esprit proche fort inspirante.

L’utilisateur et son contexte.

Petit aparté, vous vous demandez peut être pourquoi je parle de design de service plutôt que de conception centrée utilisateur (norme ISO 13407) ? La réponse est simple : parce que la CCU encadre les étapes du processus de conception (planifier le processus de conception centrée sur l’utilisateur, comprendre et spécifier le contexte d’utilisation, spécifier les exigences liées à l’utilisateur et à l’organisation, produire des solutions de conception, évaluer les solutions conçues au regard des exigences) et fourni des guidelines pour chacune d’entre elle sans décrire de méthodologie à mettre en oeuvre. Ainsi, vous pouvez utiliser une démarche CCU qui ne soit pas du design de service pour atteindre le même objectif, la seule différence sera les moyens que vous utiliserez pour l’atteindre.

Le design de service est basé sur la compréhension du comportement des usagers et s’intéresse donc prioritairement à l’utilisateur et son contexte (source).

Un des enjeux de l’entreprise collaborative est de recentrer l’entreprise sur les besoins et exigences de ses producteurs de valeurs pour leur donner les moyens de produire mieux en y prenant du plaisir tout en ayant capacité à s’adapter promptement au contexte changeant du marché et de l’écosystème de l’entreprise.

Atteindre ces objectifs demande à repenser la manière dont l’individu s’inscrit dans le collectif et la manière dont ce collectif apporte à l’individu les moyens facilitant et fluidifiant la réalisation de ses taches. La difficulté résulte dans la manière d’identifier puis représenter ces sujets complexes ainsi que les pistes de changement de la manière la plus concrète, parlante et exploitable possible tant pour la DG que le middle-management et les employés lambda. C’est précisément ici que l’apport du design de service peut permettre de faire la différence.

Les méthodologies sociologiques, visuelles, narratives et scénaristiques, … employées en design de service facilitent l’identification des éléments clés au niveau de l’individu et de son contexte collectif ainsi que l’esquisse de pistes de solution. Il est alors plus aisé de construire une vue d’ensemble articulée autour de messages stratégiques et de faire en sorte que sa représentation prenne une forme simple, lisible, mémorable et exploitable.

design de service et entreprise collaborative : le couple parfait ? (image)

Organisation & outils ne sont que des moyens..

Un autre intérêt de la démarche de design de service dans le cadre d’un projet de transformation vers le modèle d’entreprise collaborative est qu’elle force à reconsidérer le point de départ de l’analyse et de bien différencier moyens et objectifs. Dit comme cela ça semble évident, mais si vous prenez un peu de recul sur votre quotidien, vous vous rendrez probablement compte tout comme moi que nous mélangeons allègrement moyens et objectifs.

En effet, si l’on prend une problématique de ré-organisation d’équipe à petite échelle « aplanir l’organigramme et limiter le nombre de niveaux hiérarchiques » est un moyen, non un objectif hors il est aisé de tomber dans ce piège. L’objectif de l’entreprise collaborative n’est pas de simplifier et aplanir l’organisation mais de l’aligner sur les besoins et exigences des opérationnels. Ce qui vous paraît si évident à la lecture de ce billet est pourtant une réalité trop souvent rencontrée qui, si par exemple l’on détourne de son but d’origine la méthode des 5P, est pourtant facilement évitable..

design de service et entreprise collaborative : le couple parfait ? (image)

J’ai probablement beaucoup d’affinités avec cette démarche de design de service car elle fait appel pour répondre à ces questions de conception centrée sur l’utilisateur à des méthodes créatives, visuelles, narratives, …. éprouvées (car issues du monde du design) très en adéquation avec ma personnalité cerveau droit !

Et le SI dans tout ça ?

Quel peut bien être l’apport du design de service dans les projets SI, eux qui s’appuient sur des méthodes robustes et éprouvée permettant de garder sous contrôle l’ensemble du processus de conception & réalisation afin de délivrer dans les temps et en répondant au besoin exprimé ? Précisément une meilleure adéquation avec la réalité de cette nouvelle culture liée à la socialisation de l’entreprise qui fait que le besoin n’est ni le point de départ ni le point d‘arrivée mais une des étapes.

En effet dans un projet classique le besoin est connu, exprimé et décrit de manière détaillée relativement tôt, les équipes techniques n’ayant plus qu’à se baser dessus pour concevoir et réaliser l’outil (je schématise volontairement car ce n’est pas le sujet). Parfois, lorsque l’entreprise utilise des méthodes agiles expression du besoin, conception et réalisation sont menés de front dans un souci d’efficacité et de qualité. Bref, dans les grandes lignes pour un besoin donné est conçue et mise en oeuvre une solution donnée, quelque soit son mode d’expression et la temporalité associée.

Hors, dans un projet SI s’inscrivant dans une transformation de type entreprise collaborative, le besoin n’existe pas au départ, il émerge et évolue au cours du temps. Il est donc complexe de partir du besoin car ce dernier n’existe qu’à un niveau très macro (besoin de collaborer, besoin de converser, besoin de partager ses connaissance, …) et ne se révèle au niveau détaillé qu’en cours de route. La culture des équipes SI fait que ces derniers sont performant lorsqu’il s’agit de répondre à un besoin précis mais beaucoup moins lorsqu’il s’agit de faire de la prospective car ayant culturellement une forte aversion au risque peu compatible avec l’innovation.

C’est entre autre pour cela que je crois beaucoup à l’apport du design de service sur les projets SI sociaux et suis convaincu que cette approche facilite et fluidifie leur déroulement tout en maximisant l’adéquation des outils choisis avec les usages identifiés ou pressentis. En effet, ne l’oublions pas, une partie du travail d’un designer de service consiste à imaginer les dispositifs apportant de la valeur à l’utilisateur et non formaliser le besoin exprimé par lui. C’est précisément cet élément différenciant sous représenté dans les DSI qui rend précieuse cette démarche, en particulier dans le cadre de la socialisation du SI, d’autant plus si elle est associée à la capacité de la DSI à implémenter et délivrer les solutions en mode KISS faisant la part belle à l’expérimentation continue.

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Focalisé sur la compréhension des comportements d’usages et non de la fonction, visant à imaginer des dispositifs à forte valeur ajoutée pour les utilisateurs, soucieuse de l’expérience d’utilisation et du plaisir associé, faisant appel à des techniques visuelles et narratives pour faire passer les messages, le design de service est une approche qui a beaucoup à apporter à l’entreprise collaborative. D’autant que cette démarche ne peut exister que si un ensemble de professionnels collaborent tout au long du processus pour apporter leurs expertises et contribuer à construire ensemble une solution adaptée, ce qui est précisément une des postures plébiscitée par l’entreprise collaborative (ex de professions : sociologues, scénaristes, ergonomes, illustrateurs, réalisateurs, …). J’espère avoir éveillé votre curiosité sur le sujet avec ce billet (plus stratosphérique que je ne le souhaitais) et serais ravi d’échanger avec vous dans les commentaires, et pourquoi pas dans la vraie vie !

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