Cet article a été publié par Fabien Grenet sur le blog qu'il a tenu entre 2008 et 2016. Pour des question de référencement (SEO), lorsque l'agence nospoon a été créé, il a été décidé de transformer le blog de Fabien en site pour l'agence. Tous les articles ont ainsi été conservés, mais n'engagent pas l'agence quant aux contenus qui sont abordés.

Et si l’entreprise devenait un incubateur comme un autre ?

Proposer un incubateur interne au sein duquel les employés disposeraient de moyens et de temps pour concrétiser leurs idées est une vision de l’entreprise qui me tient à coeur depuis longtemps et qu’il me tardait d’aborder sur Le mag’. Je ne prétend ni avoir une solution miracle ni que cette dernière soit adaptée à toutes […]

Proposer un incubateur interne au sein duquel les employés disposeraient de moyens et de temps pour concrétiser leurs idées est une vision de l’entreprise qui me tient à coeur depuis longtemps et qu’il me tardait d’aborder sur Le mag’.

Je ne prétend ni avoir une solution miracle ni que cette dernière soit adaptée à toutes les entreprises, j’ai en revanche la certitude que le monde a changé et que l’entreprise a tout à gagner à embrasser les nouvelles contraintes le constituant. Dans ces nouvelles contraintes on trouve en particulier le fait que le temps s’accélère, que le marché est mouvant, que les clients donnent leur avis publiquement sans hésiter à interpeller l’entreprise et qu’identifier ses concurrents devient une tâche ardue lorsque du jour au lendemain plusieurs startups peuvent venir chambouler un secteur d’activité donné…

poussin

Alors bien sur, il peut être tentant de se dire que ça fait des dizaines d’années que l’on travaille de la même manière et que ça marche très bien comme ça, de considérer qu’il s’agit très certainement d’une tendance passagère et que le soufflé va retomber, bref qu’il est plus sûr d’attendre pour n’agir qu’une fois que le recul sera suffisant.. en oubliant que l’immobilisme ou la stratégie de l’autruche ne payent pas, même à court terme. A l’inverse, il peut sembler grisant de se lancer tout de go dans l’implémentation d’outils sociaux, conversationnels et auto-apprenants dans l’espoir que les employés se les approprient et portent sur leurs petites épaules la transformation structurelle, organisationnelle, culturelle et opérationnelle de l’entreprise.. sans réaliser que s’agiter dans des sables mouvants n’aide pas en en sortir, bien au contraire.

Fort heureusement il existe un juste milieu entre les deux extrêmes dont je viens de brosser le portrait et un certain nombre d’entreprises abordent leur transformation avec cette approche modérée. C’est dans cet espace que vient prendre place ma réflexion du jour. En effet, je propose une piste parmi tant d’autres visant à rendre l’entreprise capacitante en lui permettant d’aborder les questions avec une posture hybride design thinking / business thinking facilitant l’émergence de réponses pertinentes, élégantes, pérennes et profitables.

Cette piste consiste en la mise en oeuvre d’un incubateur interne à l’entreprise, prolongement idéal des démarches d’innovation participative lancées ces dernières années par beaucoup d’entreprises et permettant de confier la mise en oeuvre des idées aux employés qui les ont eu !

Un incubateur est une structure d’accompagnement de projets de création d’entreprises (source : wikipédia + @mitchdeg). Le principe général d’un incubateur est d’apporter un support structurel, financier, méthodologique à des porteurs de projets triés sur le volet tout en leur prodiguant force conseils et coups de main pour faire mûrir et parfaire l’idée, le modèle économique, le produit ou le service, le positionnement, l’équipe, … En résumé, un incubateur donne les moyens à une startup de passer du mode idée / expérimentation au mode Entreprise pérenne et profitable grâce à un accompagnement ad-hoc.

Une start-up est une phase temporaire vécue par un groupe de personnes qui testent des choses jusqu’à ce que cela fonctionne à petite échelle, puis qui passent à une phase de “scaling” afin d’en faire une grande entreprise – Guilhem Bertholet,

La démarche d’incubateur interne que je propose est basée sur le même principe. Il s’agit de fournir budget et ressources opérationnelles à des groupes d’employés dégagés de leurs responsabilités habituelles sur une durée de 3 à 6 mois renouvelables pour mettre en oeuvre leurs projets, sélectionnés à l’issue d’un cycle d’innovation participative. Pour rappel, l’innovation participative a pour objet de capter les bonne idées en mode bottom-up avec l’ambition d’ensuite les mettre en oeuvre afin de capitaliser sur les connaissances et le sens des réalités du terrain des employés, d’en extraire la substantielle valeur ajoutée et de les rendre profitables pour l’entreprise. Au passage, si vous pensez que libérer les employés incubés de leurs obligations opérationnelles est trop compliqué pensez aux exemples de Google, 3M et Kenexa. Kenexa incite ses employés à profiter d’un dispositif de congé rémunéré de 6 mois pour travailler dans une organisation humanitaire ou caritative parce qu’elle pense (et l’a vérifié) que donner ce temps à ses employés les motive et les rend plus productifs, Google permet à ses employés de passer 20% de leur temps sur des projets personnels (qui bien souvent finissent par devenir des services google) et 3M encourage ses employés à utiliser 15% de leur temps sur des projets indépendants en leur accordant les royalties des brevets éventuellement déposés à l’issue de leurs travaux… !!

Actuellement, dans la majorité des dispositifs d’innovation participative les idées qui sont sélectionnées sont ensuite mises en oeuvre via le processus opérationnel habituel de l’entreprise, souvent conçu pour le monde d’hier donc peu adapté pour donner les meilleurs résultats. Un peu comme si, mécontent des coupes réalisées par votre coiffeur vous pensiez que le simple fait de lui proposer un modèle sympa trouvé dans un magazine changera la donne.. Heureusement, certaines entreprises disposent déjà d’équipes dédiées à la mise en oeuvre agile de projets issus des dispositifs d’innovation participative, à l’image du département d’innovation opérationnelle dont je parlais il y a un an, mais rares sont celles qui sont allées jusqu’à une logique d’incubateur.

Xavier Boileau, directeur de l’innovation pour Générali, a expliqué lors de la conférence EBG sur la consumérisation de l’IT la valeur ajoutée que peut avoir un tel laboratoire d’innovation interne (il a contribué à créer InnovLab chez Générali), et pour en avoir discuté rapidement après la conférence faire un pas de plus en directions d’un incubateur ne lui semblait pas dénué d’intérêt même si les contraintes de mises en oeuvre ne sont pas les mêmes et lui semblaient importantes.

Le groupe Casino a lui déjà sauté le pas et s’appuie sur une cellule permanente de volontaires appelée Co’JT (cogiter) qui permet à des porteurs d’idées internes de mener à bien leur projet en mode start up, comme par exemple Christelle Dorat, Marina Lin, Adrien Moreira et Henrik Perrochon à l’origine du site CVous. Dans le cas de Casino, bien que l’initiative soit à saluer, il est malgré tout dommage que l’incubateur ne soit pas ouvert de manière plus large aux employés autres que ceux éligibles au programme Jeunes Talents.

Il est bien sur possible d’objecter à cette vision enchanteresse le monde réel fait de coupures budgétaires et de ressources humaines précieuses et limitées, mais je suis convaincu qu’il s’agit d’un faux problème. En effet, ces projets incubés en mode startup représentent un puissant levier de croissance et de découverte de nouveaux marchés dont le ROI, s’il n’est pas forcément mesurable, n’en reste pas moins clairement perceptible. Certes, cela demandera un travail de fond entre les directions métiers, la direction générale et les ressources humaines pour obtenir un dispositif accepté de tous et équilibré, mais le jeu en vaut la chandelle.

En allant un peu plus loin, on peut imaginer que progressivement la place des projets incubé grandisse dans l’entreprise et que ces derniers deviennent la norme, que finalement cette approche permette de petit à petit se transformer en un Semco ou Morning Star… Ce serait bien sur formidable mais pour ça il faut déjà se jetter à l’eau en appliquant la méthode des petits pas, à savoir commencer petit et apprendre en marchant, car finalement le plus important est moins de tenter d’atteindre une destination identifiée que de prendre la route avec une posture d’étonnement permettant de décider aux moments opportuns de la meilleure direction à emprunter.

En conclusion, proposer un incubateur interne c’est avoir l’assurance que les équipes qui vont porter les projets seront motivées et feront tout pour que leur projet aboutisse et se pérennise, c’est également apporter une réponse intelligente à la question « quel est le sens de mon engagement pour l’entreprise » que se posent beaucoup d’employés en cette période de disette. Dans un monde mouvant dans lequel l’entreprise doit quasiment se réinventer, l’incubateur interne est une des réponses qui permet de générer des opportunités sans se disperser en s’appuyant sur les talents internes de l’entreprise tout en favorisant l’émergence d’une nouvelle dynamique interne indispensable à tout projet de transformation et de changement profond.



 

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